Comment aborder plus sereinement notre rapport à l’âge - Alphonse

T’es trop vieux/vieille pour…” Voilà quelque chose que vous avez peut-être déjà entendu. Même si le vieillissement est perçu différemment par chacun·e d’entre nous, ce n’est pas toujours facile de le vivre dans une société qui cultive toutes les valeurs liées à la jeunesse. Pourtant vieillir est un processus naturel et inévitable. Alors, d’où nous vient cette peur ? Et comment changer de regard sur le vieillissement ? On s’est penchés sur le sujet.

Publié en Mar. 2021
Par Tessa Georges Tessa Georges

Mar. 2021

Tessa Georges

Tessa Georges

Rédactrice

Pourquoi cette peur ?

Je me souviens de mes parents à 60 ans, ils faisaient déjà vieux. Moi je n’ai pas envie de cela, je veux vieillir le plus lentement possible” : ce témoignage de Thierry, ancien participant de notre bilan de compétences, est révélateur de la peur que partagent bon nombre d’entre nous à l’idée de prendre de l’âge. 

En fait, le problème ce n’est pas l’âge mais la façon dont on le regarde. Comme le souligne le sociologue Serge Guérin, on a tendance “à associer le verbe “vieillir” avec déclin, conservatisme, perte, manque d’ambition. On parle souvent des besoins des personnes plus âgées mais rarement des désirs”. Et donc face à la vieillesse on peut avoir une “honte voir un dégoût de soi”. Rien que les expressions (quotidiennes) comme “prendre un coup de vieux”, “faire jeune pour son âge” renforcent l’idée que le vieillissement n’est pas une bonne chose et qu’il faut tout faire pour rester jeune. “Je ne suis pas encore à la retraite mais au boulot au lieu de m’appeler par mon prénom on m’appelle “mamie””nous racontait Eve, bientôt à la retraite. Autre exemple frappant : certaines expériences de placardisation en entreprise participent à véhiculer cette image et à faire ce que l’on appelle de l’âgisme.

L’importance de changer de regard sur le vieillissement

Pour l’auteur Carl Honoré, “mettre des gens dans des cases nous limitent.” Il conseille de sortir de cette logique et de voir le fait de vieillir comme une chance plutôt qu’une punition. Dans son livre La révolution de la longévité, il explique qu’en vieillissant, on a alors toutes les cartes en main pour devenir la personne que nous aurions dû être depuis toujours. C’est d’ailleurs ce sur quoi s’aligne également l’auteure Perla Servan-Schreiber : “c’est vrai quil y a des choses que l’on ne fait plus mais c’est une autre respiration, moi j’ai découvert ce qu’était la liberté par exemple. Dans une étude de l’Insee (2008), ce qui est intéressant c’est que l’on s’aperçoit que le pic de “bonheur” est atteint après 60 ans. La courbe vient même dépasser le niveau de bien-être de nos 20 ans. Une explication ? Pour Carl Honoré, c’est lié au fait que “l’on se comprend mieux, on est plus à l’aise avec soi-même. Toute notre vie on se dit “je serai heureux quand…” et passé 60 ans, on a compris que le bonheur c’est l’instant présent. On sait tout simplement mieux vivre.” Une chouette philosophie. Et plus concrètement, comment s’y prendre pour mieux appréhender cette peur ?

2 astuces pour y parvenir
  • 1

    Faire un travail d’acceptation

    L’âgisme, c’est une prophétie auto-réalisatrice. Les études montrent clairement que si vous idéalisez la jeunesse et que vous dénigrez le fait de vieillir, vous allez vieillir moins bien, vous allez souffrir” explique Carl Honoré. Le premier pas consiste donc à résister aux stéréotypes et à accepter que les années passent. “Un nouvel état commence toujours par l’acceptation. Et c’est cette acceptation qui va faire que l’on aura de nouveaux projets. Et quand on a des projets, on est dans la vie. Vieillir ce n’est pas qu’une question physique. Bien sûr c’est ce que l’on voit le plus (ce qui ne nous fait pas toujours plaisir) mais c’est aussi tellement d’autres choses. Pour moi, accepter que la jeunesse c’est derrière nous, c’est faire le choix d’un chemin pour être plus heureuse” complète Perla Servan-Schreiber.

    Ce qui peut aider : pour commencer, les auteurs soulignent l’importance d’avoir des modèles, c’est-à-dire des personnes (connues ou non) de plus de 60 ans qui vous inspirent. C’est ce qui va participer à votre redéfinition du vieillissement. Pour Carl Honoré, c’est par exemple John Goodenough, le scientifique de 94 ans qui continue à réinventer les piles rechargeables : “Il prouve bien qu’il n’y a pas d’âge pour être créatif” Si vous avez une petite panne d’idées, on vous conseille d’aller jeter un coup d’œil au site Oldyssey : un projet vidéo dans lequel Julia et Clément dressent le portrait de héros grisonnant·es aux 4 coins du monde. 

  • 2

    Faire un travail de reconversion

    “Pendant très longtemps on est ce que l’on fait. Et puis un jour on ne sait pas ce que l’on fait car on a arrêté de bosser. Et en fait on apprend que ce n’est pas parce qu’on ne travaille plus que l’on n’est rien” explique la journaliste et écrivaine Colombe Pringle.
    La réflexion à enclencher ? Trouver ce qui vous donne envie de vous lever le matin. “Accompagner les changements et explorer d’autres facettes de moi, voilà ce qu’il faut faire et ce que m’a permis de faire le programme” nous racontait d’ailleurs Yves, l’un des premiers participants à notre bilan de compétences.

    Ce qui peut aider : Vous lancer dans de nouvelles choses. “La nouveauté, cela nourrit. Se mettre en situation de débuter, cela donne envie de se dépasser. C’est un vrai stimulant. C’est un peu comme un roman, on passe à un nouveau chapitre, avec les yeux ouverts pour embrasser la prochaine étape” explique Carl Honoré. Pourquoi ne pas essayer une activité longtemps enfouie dans un creux de votre tête ? 

    On a aussi écrit plusieurs articles qui pourraient vous permettre de cogiter sur tout cela : un pour mieux comprendre ce qui vous anime au quotidien. Et un autre pour faire le point sur votre travail et avoir des pistes de nouveaux projets.

Un dernier conseil pour la route : celui d’enlever la pression de faire toujours plus de choses. Pour Carl Honoré, “ce qui ce passe également c’est qu’avec l’âge on a un sentiment d’accélération du temps qui passe. Je conseille de prendre un peu de recul et de regarder tout ce que l’on essaye parfois de faire dans la journée et de laisser tomber une chose ou deux pour faire rentrer de l’espace, de l’oxygène dans sa vie”. De cette manière, vous vivrez vos journées davantage comme des choix. Faire le tri et vous faire plaisir, ce sont d’ailleurs deux choses que la retraite peut vous permettre.

Pour aller plus loin
  • Un peu de cinéma : le témoignage de l’essayiste Laure Adler qui raconte son histoire et sa vision de l’âge. La phrase qui nous a fait mouche ? “Il ne tient qu’à soi de fabriquer du vivant, du lien social et du dépassement de soi”.

  • Un peu de lecture : le livre Les promesses de l’âge de Perla Servan-Schreiber dans lequel elle explique que vieillir est une aventure. Ou encore La révolution de la longévité de Carl Honoré qui invite à casser les préjugés et abattre les frontières qui séparent les différents âges de la vie.

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